Une série de quatre documentaires radiophoniques, diffusée du lundi 29 mars au jeudi 1er avril 2021 sur France Culture.
Avec l’Affaire Snowden, le scandale Cambridge Analytica, ou encore les révélations des Spy Files par Wikileaks, j’ai pris conscience que mes activités sur internet étaient surveillées. J’ai beau le savoir, je ne fais pas grand-chose pour l’éviter. Dans ma tête, c’est comme si c’était le prix à payer pour aller sur internet. Je continue à poster mes coups de gueule sur Facebook, je consulte Twitter plusieurs fois par jour, je commande des pizzas sur internet et je fais des milliers de recherches sur google. Mais à cause de l’épidémie de Covid19, quasiment toute ma vie, sociale et professionnelle, passe par mon ordinateur ou mon smartphone. Depuis le premier confinement, les questions se bousculent dans ma tête sans que j’arrive à les ignorer : que sont les données numériques ? Que révèlent-elles sur moi ? Qui les surveille et à quoi peuvent-elles servir ? Dans quelle mesure cette surveillance numérique est-elle problématique ? J’ai donc retroussé mes manches et, armé de mes livres, mon micro et mon clavier, j’ai décidé de mener l’enquête pour comprendre ce qu’il en était.
Épisode 1 : Le capitalisme de surveillance
En fouillant dans mon smartphone et dans mon ordinateur, je me suis aperçu que des pisteurs récoltent mes données personnelles en permanence. Derrière les grandes entreprises que l’on connait bien tel Google, Facebook ou Amazon, se cachent tout un écosystème obscur qui fait commerce de mes données personnelles. La plupart du temps, celles-ci sont utilisées pour me proposer de la publicité la plus ciblée possible et en déduisent mes comportements, mes envies et mes humeurs. Mais elles alimentent aussi des algorithmes de prédictions dont le rôle est de me faire consommer toujours plus et toujours plus longtemps de contenu, comme par exemple des vidéos You Tube. Et, quand la régulation n’est pas à la hauteur, elles peuvent même devenir des armes politiques dans le but d’influencer des élections. Ce système a un nom : le capitalisme de surveillance et, je dois l’avouer, il me fait un peu peur…
Avec : Esther, consultante en cybersécurité, membre fondatrice de l’association Exodus Privacy ; Gonzague de la Tournelle, Directeur général de Madverstise ; Christophe Masutti, philosophe et historien des sciences auteur de Affaires privées. Aux sources du capitalisme de surveillance ; Guillaume Chaslot, ingénieur, président d’Algotransparency ; Armand Heslot, chef du service de l’expertise technologique de la CNIL ; Laurent Frisch, directeur du numérique à Radio France.
Épisode 2 : Géopolitique de la surveillance numérique
Depuis l’affaire Snowden, il est devenu clair que les services de renseignement surveillent les infrastructures numériques. Les câbles et les data center par lesquels transitent nos données numériques sont devenus des enjeux géostratégiques majeurs. Mais je me demande ce que peuvent vraiment les services de renseignement. Enregistrent-ils vraiment tout ce que je tape sur mon clavier et tout ce que le micro de mon téléphone capte ? Ce qui est certain est que le cyberespionnage explose et les enjeux de puissance qui l’entourent sont de plus en plus importants. Et malheureusement cette militarisation du cyberespace porte préjudice aux simples utilisateurs d’Internet. Alors, qui m’espionne ?
Avec : Fabrice Coquio, Président d’Interxion France ; Aude Géry, juriste, spécialiste de la prolifération des armes numériques et de la géopolitique du cyberespace ; Antoine Champagne, journaliste, rédacteur en chef du site Reflets.info ; Felix Tréguer, sociologue, membre de la Quadrature du Net, auteur de L’utopie déchue, une contre-histoire d’internet (Fayard, 2019) ; Bernard Barbier, consultant en cybersécurité, ancien directeur technique de la DGSE.
Épisode 3 : Dans les allées de la safe city
Depuis quelques années, la vidéo surveillance automatique s’est implantée dans plusieurs villes françaises. Un mouvement de villes et d’entreprises qui espèrent rendre les cités plus sûres grâce à l’utilisation de solutions technologiques. Ce marché de la safe city est encore balbutiant en France mais certains mettent en garde contre ce qu’ils perçoivent déjà comme une délégation de la surveillance de l’espace public à des algorithmes. C’est le cas notamment de l’association La Quadrature du Net et de sa campagne Technopolice. Intrigué (et un peu inquiet) j’ai donc décidé d’aller observer avec ces militants les dispositifs de surveillance numérique installés dans nos villes pour comprendre ce qui leur fait si peur.
Avec : Christian Belpaire, Directeur Prévention, Sécurité, Tranquillité Publique de la Ville de Roubaix ; William Eldin, PDG de l’entreprise XXII ; Myrtille Picaud, sociologue spécialiste des marchés de safe city en France ; Les militant.e.s de la Quadrature du Net, Eda, Martin Drago, Felix Tréguer et Benoit Piedallu.
Épisode 4 : Échapper à la surveillance
La surveillance numérique a pris durant la dernière décennie des dimensions hégémoniques. Il est peut-être temps de commencer à apprendre à m’en protéger. Car dans certains pays, en Chine par exemple, difficile de faire entendre une critique si l’on ne peut pas échapper à la surveillance que le régime fait peser sur les citoyens. En tant que journaliste, il me faut donc savoir chiffrer mes communications pour assurer la sécurité et l’anonymat de mes sources. Mais cela ne suffira pas à résoudre le problème du capitalisme de surveillance. De l’obfuscation au refus de l’utilisation de l’informatique en passant par la refonte d’Internet et de sa structure, je suis allé explorer différentes voies nous permettant de s’émanciper de la surveillance numérique.
Avec : Meiirbek Salanbek, ingénieur et journaliste réfugié en France ; Judy Tseng, journaliste correspondante à Paris de différents médias Taïwanais ; Jean-Marc Bourguignon, hacker, fondateur de l’ONG Nothing2Hide ; Helen Nissenbaum, professeur de sciences de l’information à l’université de Cornell, co-autrice de Obfuscation, La vie privée, mode d’emploi (C&F éditions, 2019) ; Geoffrey Dorne, designer, auteur de Hacker Citizen ; Maïwaan, designeuse web, militante de l’association Framasoft ; Kelthoum, assistante sociale, militante du collectif Ecran Total.
Émission : LSD – La Série Documentaire,
Réalisation : Rafik Zenine
Prise de son : Martin Troadec, Régis Nicolas, Valérie Lavallart
Mixage : Eric Boisset
Avec la voix d’ Anne de Peufeilhoux